"« Le recours à l’activité partielle doit permettre aux entreprises de faire face à des difficultés présentant un caractère temporaire ».
Circulaire DGEFP n°2010/13 du 30 mars 2010 relative à la mise en œuvre de l’activité partielle en 2010.
Au 20 mars 2020 et en dépit des annonces faites par le Président de la république et de son gouvernement, l’employeur est tenu à minima, de verser 70 % du salaire brute (84% du net) à ses salariés en activité partielle et peut espérer percevoir une allocation fixée comme suit : - 7,74 euros par heure chômée pour les entreprises de 1 à 250 salariés, - 7,23 euros par heure chômée pour les entreprises de plus de 250 salariés.
Sur l’entrée en vigueur de la majoration d’indemnisation : Wait and see …
L’idée affichée de la présente note technique n’est pas de garantir le bénéficie du dispositif de l’activité partielle et de son indemnisation mais d’éviter autant que possible, un rejet de la demande d’indemnisation au titre de l’activité partielle faite auprès du Préfet ou sur délégation auprès la DIRECCTE, en raison d’un exposé des motifs de recours qui pourrait se révéler approximatif.
Se limiter à évoquer dans le formulaire, le Coronavirus, les chinois, le Président Macron, les italiens ou encore le confinement (qui n’en est pas un puisque les entreprises qui ne sont pas des commerces non-essentielles sont appelées à poursuivre leur activité) ne suffit pas. Soyons clairs. De précis motifs de recours doivent être renseigner.
CE QUE LE CODE DU TRAVAIL DIT
Les salariés sont placés en position d'activité partielle, après autorisation expresse ou implicite de l'autorité administrative, s'ils subissent une perte de rémunération imputable: -soit à la fermeture temporaire de leur établissement ou partie d'établissement ; -soit à la réduction de l'horaire de travail pratiqué dans l'établissement ou partie d'établissement en deçà de la durée légale de travail. (Article L5122-1 du Code du travail)
L’activité partielle est un mécanisme d’aides aux entreprises réservé à celles subissant une période de sous-activité, laquelle doit réunir les deux conditions cumulatives suivantes : - la réduction ou la suspension doit avoir un caractère temporaire, - le motif doit avoir un caractère exceptionnel.
Pour pouvoir recourir au dispositif de l’activité partielle, l’entreprise doit indiquer qu’elle a placé ses salariés (c’est une mesure collective et non individuelle) en position d'activité partielle parce qu’elle est contrainte de réduire ou de suspendre temporairement son activité pour l'un des motifs suivants : 1° La conjoncture économique ; 2° Des difficultés d'approvisionnement en matières premières ou en énergie ; 3° Un sinistre ou des intempéries de caractère exceptionnel ; 4° La transformation, restructuration ou modernisation de l'entreprise ; 5° Toute autre circonstance de caractère exceptionnel *.
(Article R.5122-1 du Code du travail)
* A l’époque de l’ancien dispositif légal de chômage partiel, cette circonstance à caractère exceptionnel visait les cas de « force majeure » à savoir situation qui n’avait pas pu être prévue, ni empêchée et qui n’était pas imputable à la personne qui entendait s’en prévaloir » (Lettre DE n°48-80, 14 août 1980).
CE QUE LE MINISTRE PRECONISE ET CE QUE L’ADMINISTRATION DU TRAVAIL ATTEND
Sur la base des préceptes et propositions du Ministère du Travail, l’entreprise est invitée à faire référence le cas échéant, à l’une des situations ci-après :

APPLICATIONS
Le cas de figure 1 renvoie aux commerces visés par les arrêtés des 14 et 15 mars 2020 portant diverses mesures relatives à la lutte contre la propagation du virus covid-19. Ces arrêtés enjoignent aux établissements ci-après catalogués de ne plus accueillir du public, jusqu’au 15 avril 2020. - au titre de la catégorie L : Salles d'auditions, de conférences, de réunions, de spectacles ou à usage multiple ; - au titre de la catégorie M : Magasins de vente et centres commerciaux sauf pour leurs activités de livraison et de retraits de commandes ; - au titre de la catégorie N : Restaurants et débits de boissons * ; - au titre de la catégorie P : Salles de danse et salles de jeux ; - au titre de la catégorie S : Bibliothèques, centres de documentation ; - au titre de la catégorie T : Salles d'expositions ; - au titre de la catégorie X : Établissements sportifs couverts ; - au titre de la catégorie Y : Musées ; - au titre de la catégorie CTS : Chapiteaux, tentes et structures ; « - au titre de la catégorie PA : Établissements de plein air ; « - au titre de la catégorie R : Établissements d'éveil, d'enseignement, de formation, centres de vacances, centres de loisirs sans hébergement, sauf ceux relevant des articles 4 et 5.
Attention - Restaurants et débits de boissons. Des établissements de cette catégorie ne sont pas concernés par la fermeture administrative. Sont autorisés à maintenir leurs activités ceux qui offrent en parallèle d’un service en salle, des services de vente à emporter et de livraison. Autrement dit, ces établissements faisant du drive ou de la livraison ne doivent pas se baser sur ce seul cas de figure 1 pour mettre la totalité de leur personnel à l’arrêt au titre de l’activité partielle.
Idem, ne sont pas efficaces, ceux qui entendent se servir de ce cas de figure alors qu’ils sont autorisés à poursuivre leurs activités et à recevoir du public, à savoir les établissements suivants :
Entretien et réparation de véhicules automobiles, de véhicules, engins et matériels agricoles
Commerce d'équipements automobiles
Commerce et réparation de motocycles et cycles
Fourniture nécessaire aux exploitations agricoles
Commerce de détail de produits surgelés
Commerce d'alimentation générale
Supérettes
Supermarchés
Magasins multi-commerces
Hypermarchés
Commerce de détail de fruits et légumes en magasin spécialisé
Commerce de détail de viandes et de produits à base de viande en magasin spécialisé
Commerce de détail de poissons, crustacés et mollusques en magasin spécialisé
Commerce de détail de pain, pâtisserie et confiserie en magasin spécialisé
Commerce de détail de boissons en magasin spécialisé
Autres commerces de détail alimentaires en magasin spécialisé
Les distributions alimentaires assurées par des associations caritatives
Commerce de détail de carburants en magasin spécialisé
Commerce de détail d'équipements de l'information et de la communication en magasin spécialisé
Commerce de détail d'ordinateurs, d'unités périphériques et de logiciels en magasin spécialisé
Commerce de détail de matériels de télécommunication en magasin spécialisé
Commerce de détail de matériaux de construction, quincaillerie, peintures et verres en magasin spécialisé
Commerce de détail de journaux et papeterie en magasin spécialisé
Commerce de détail de produits pharmaceutiques en magasin spécialisé
Commerce de détail d'articles médicaux et orthopédiques en magasin spécialisé
Commerce de détail d'aliments et fournitures pour les animaux de compagnie
Commerce de détail alimentaire sur éventaires et marchés
Vente par automates et autres commerces de détail hors magasin, éventaires ou marchés n. c. a.
Hôtels et hébergement similaire
Hébergement touristique et autre hébergement de courte durée lorsqu'il constitue pour les personnes qui y vivent un domicile régulier Terrains de camping et parcs pour caravanes ou véhicules de loisirs lorsqu'ils constituent pour les personnes qui y vivent un domicile régulier
Location et location-bail d'autres machines, équipements et biens
Location et location-bail de machines et équipements agricoles
Location et location-bail de machines et équipements pour la construction
Activités des agences de placement de main-d'œuvre
Activités des agences de travail temporaire
Réparation d'ordinateurs et de biens personnels et domestiques
Réparation d'ordinateurs et d'équipements de communication
Réparation d'ordinateurs et d'équipements périphériques
Réparation d'équipements de communication
Blanchisserie-teinturerie
Blanchisserie-teinturerie de gros
Blanchisserie-teinturerie de détail
Services funéraires
Activités financières et d'assurance
Le cas de figure 5 fait référence aux entreprises dont l’activité repose sur l’approvisionnement en matières premières ou nécessite la fourniture d’outils et matériaux et qui éprouvent des difficultés majeures à satisfaire leurs besoins.
Entreprises du bâtiment :
Les commerces de détail de matériaux de construction, quincaillerie, peintures et verres en magasin spécialisé et établissements de location et location-bail d'autres machines, équipements et biens et de location et location-bail de machines et équipements pour la construction sont autorisés à ouvrir.

Partant, les entreprises du bâtiment seront donc, considérées par l’administration, comme dans la situation de pouvoir se fournir en matériaux et outillages pour la poursuite de leur chantier et ne pourront donc, se prévaloir de ce cas de figure … sauf à pouvoir justifier matériellement (courriers, annonces en ligne … attestant de la situation) de la fermeture de ces établissements et de leurs difficultés à s’approvisionner.
Restauration (drive/livraison) :
Nombre d’établissement de restauration ont communiqué sur leur fermeture au public et l’arrêt de toutes leurs activités (drive et livraison compris) en se fondant sur le principe de précaution et dans le but de répondre à leur obligation de sécurité de résultat.

Si la position retenue est louable, elle semble à date, aller à l’encontre d’une prise en charge des heures chômées par l’Etat, sur le fondement des textes rappelés ci-dessus.
L’employeur se doit en effet, d’actualiser son document unique d’évaluation des risques professionnels, faire appliquer au personnel, les gestes barrières et autres consignes de sécurité édictées en temps de Covid-19 (jusqu’à sanctionner ces manquements) et s’assurer de la décontamination possible de son lieu de travail. Ainsi, il remplira son obligation de sécurité.
Craindre de ne pas respecter son obligation de sécurité (et de participer à la propagation de l’épidémie) ne constitue pas malheureusement, un motif de recours à l’activité partielle.
Aussi, il est préconisé de s’inscrire au-delà des indications du Ministère du travail contenues dans son document en ligne « Questions/réponses pour les entreprises et les salariés » et de revenir aux fondamentaux à savoir les dispositions de l’article R.5122-1 du Code du travail.
Ces entreprises sont manifestement en droit de se prévaloir d’un des motifs légaux de recours à l’activité partielle à savoir, la conjoncture économique.
En 2010, la Circulaire DGEFP n°2010/13 du 30 mars 2010 relative à la mise en œuvre de l’activité partielle en 2010 signalait que « compte tenu de la gravité des difficultés rencontrées dans le cadre d’une dégradation générale de la conjoncture économique, il semble opportun d’avoir une lecture souple du caractère temporaire de ces difficultés. Cette approche permettra de limiter les conséquences d’une crise susceptible de durer plusieurs mois en préservant les effectifs des entreprises concernées ».
Réduction d’activité à caractère structurel ou conjoncturel ?
Dégradation de la conjoncture économique il y a. Elle a été précipitée par les mesures de restrictions de déplacements des citoyens qui sont loin de bénéficier aux établissements offrant des services de drive.
Le Gouvernement autorise en effet, la possibilité de quitter son domicile, en remplissant une déclaration individuelle, uniquement pour : - aller au travail et en revenir, et pour les déplacements professionnels inévitables, - raisons de santé ; - faire vos courses essentielles ; - des motifs familiaux impérieux, l’assistance de personnes vulnérable ; - pour des déplacements brefs, à proximité du domicile, liés à l’activité physique individuelle des personnes à l’exclusion de toute pratique sportive collective, et aux besoins des animaux de compagnie.
Force est de constater que remplir son dossier de demande d’indemnisation au titre de l’activité partielle peut s’avérer délicat.
Les difficultés d’approvisionnement seront sans nulle doute, souvent contestées par l’administration et conduiront au rejet de la demande.
Le principe de précaution combiné au souci de respecter l’obligation de sécurité à la charge de l’employeur ne constitue pas non plus, un cas de recours à l’activité partielle admis par l’administration.
La vigilance est donc, de mise car il n’est guère envisageable de pouvoir compter sur la tolérance de l’administration.
Il est vivement préconisé, à mon sens, à défaut de pouvoir s’appuyer sur la fermeture administrative ou sur un autre cas de figure exposé par le Ministère du travail dans son document « Questions/réponses pour les entreprises et les salariés », de s’appuyer sur la conjoncture économique.
Partant de cette notion, il faut décrire en quoi, elle contraint l’entreprise à stopper temporairement son activité :
Interdiction faite aux clients de se rendre aux établissements de restauration,
Difficile projection en matière d’approvisionnement en denrées alimentaires avec le risque majeur de pertes,
Fermetures successives de centres d’approvisionnement en matériaux, outillages…
Important défaut de règlement de factures par sa clientèle…
N’OUBLIEZ PAS LE CSE
Le formulaire de demande de convention de chômage partiel est explicite. Les membres de la délégation du personnel du Comité social et économique (CSE) doit être consultés.
Recourir à l’activité partielle fait l’objet d’une consultation du CSE. L’avis doit être joint au formulaire !
Le refus ou l’autorisation préfectorale de recourir à l’activité partielle doit, elle, faire l’objet d’une information de l’instance représentative du personnel.
Rappel – Le CSE a remplacé les délégués du personnel, le CHSCT et le comité d’entreprise et la délégation unique du personnel dans toutes les entreprises depuis le 1er janvier 2020.
Si d’aventure, votre entreprise ne disposait pas de CSE en raison de son effectif inférieur à 11 salariés ou en raison d’une carence de candidats lors des dernières élections professionnelles, il faut le spécifier."
"Renseigner sa demande d’indemnisation au titre de l’activité partielle : Ne pas manquer le cadre !"
Note technique en Droit du Travail
Par Me Laurent DUCHARLET
22 boulevard Vincent Auriol 31170 Tournefeuille